samedi 3 août 2013

Sándor Márai * Fin de semaine (Hétvége)


3 septembre 2011
   Il y a deux ans, juste après les trois jours passés à Venise, comme un fait exprès, je suis tombée sur un petit volume, dans une librairie hongroise où je suis entrée glaner quelques lectures pour l'année à venir. "Une nuit à Venise", nouvelles vénitiennes d'écrivains hongrois... Comme pour prolonger les sensations toutes fraîches...

"Samedi, je m'envolai pour Venise..." Ces mots auraient pu figurer dans les récits d'écrivains utopistes du début du siècle. Donc, samedi, je me suis envolé pour Venise. Je suis parti à 9 heures. A midi et demie, je déambulais sur le Lido, le vaporetto m'a transporté à l'hôtel, à 1 heure, j'étais à table et à 2 heures, je suis allé boire un café à la place San Marco. Le soleil brillait. La brioche qui accompagnait le café avait un goût de vanille. Du sirop dans une carafe de cristal remplaçait le sucre. Il y avait de la musique partout sous les arcades. Vue du haut, tout comme du bateau, Venise semblait un étincellement de marbres et d'oripeaux multicolores. Sa beauté est insoumise aux cartes postales, aux voyageurs de noce et aux souvenirs; des siècles n'ont pas pu la souiller de la bave de leur enthousiasme visqueux. Conduis-moi où tu veux, ai-je dit au gondolier. Nous avancions lentement, l'eau berçait le cercueil noir et ce balancement m'a rappelé l'avion qui avait survolé la montagne avec la sérénité des très grands navires, sans tanguer. Dans une gondole, le passager attrape plus facilement le mal de mer. J'ai aperçu l'équarisseur d'eau qui se démenait dans sa gondole à barreaux avec ses chiens rebelles, ramassés dans les rues étroites par ses collègues terrestres. Dans la porte de l'hôpital, une vieille femme pleurait. Le ciel était sans nuage: un ciel de début de mai à Venise. (...)

(traduit par RozsaTatàr)

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